Michaël Mottequin est pilote d’hélicoptère chez Corail depuis 3 ans. A 40 ans, ce féru d’aéronautique « surtout l’hélicoptère et le nautisme, qui sont assez similaires » – aime avant tout « la navigation, les sensations, le sentiment d’être libre sur la mer comme dans les airs ». Rencontre avec un passionné.
Pilote d’hélicoptère, c’est un rêve d’enfant ?
Un rêve oui, mais qui me semblait inaccessible ! Je l’avais donc un peu écarté un moment.
J’ai commencé dans l’aéronautique il y a 17 ans, avec l’ULM. J’ai volé pendant 14 ans à La Réunion puis j’ai évolué vers le largage de parachutistes, l’instruction, les vols touristiques, les vols personnels aussi. Je me suis bien éclaté mais j’ai voulu avancer.
Un jour un ami m’a parlé de l’hélico. J’ai essayé de piloter en double commande et, sans surprise, ça m’a plu ! C’était exceptionnel. L’hélico, c’est magique : tu décolles, tu es à 30 cm du sol et tu voles. Ce que tu imagines dans tes rêves, tu peux le faire en vrai !
À la suite de ce premier vol, j’ai fait ma formation. Ça m’a ouvert les yeux : je me suis dit que ce n’était pas si inaccessible que ça, qu’il était possible de se reconvertir. Ça été long (un an et demi environ), ça a demandé beaucoup de travail et de concessions, mais je suis content d’être là !
Quelles qualités vous ont permis de devenir pilote ?
D’abord, le fait d’avoir déjà volé à La Réunion car ici la météo change très vite, les vols sont techniques, montagneux, les vents sont changeants dans les différents secteurs de l’île, le relief amplifie les phénomènes. Et l’altitude fait qu’on doit beaucoup checker ses performances, anticiper par rapport au poids des passagers, aux marchandises transportées, aux variations de température rapides, etc.
Ensuite il y a eu mon âge : il faut être posé pour être pilote d’hélicoptère ! Quand tu es père de famille ça aide. Ce métier n’est pas pour les fêtards, il faut se coucher tôt et être du matin. Moi je me couche avant 21h30 pour avoir la pêche.
Et enfin le relationnel : quand on est pilote, on fait tous les commentaires, on présente l’île, le paysage, l’histoire de la Réunion, etc.
Quel a été votre parcours ?
Je suis entrepreneur et artisan ! Encore aujourd’hui, j’ai une entreprise de carrosserie automobile à Saint-Paul, dont je suis gérant et actionnaire majoritaire. Avant cela j’ai passé un bac éco, un BTS informatique, un BTS assistant de gestion, un CAP carrosserie, j’ai fait du câblage informatique dans les télécoms…
Depuis mai 2016, je travaille à temps plein chez Corail Hélicoptères : je suis pilote mais aussi Responsable désigné à la Formation des équipages : je forme les nouveaux pilotes, je forme les pilotes aux nouvelles machines, etc.
Qu’est-ce qui vous plaît dans votre métier ?
L’hélicoptère est un monde très varié. Dans les vols touristiques, il faut s’adapter aux gens : pour 80 % des personnes, ce sont des baptêmes, il faut donc gérer les peurs, parfois la claustrophobie, adapter notre style de vol aux personnes, parfois savoir calmer les ardeurs de certains, ajuster les commentaires…
En plus des vols touristiques, qui représentent environ 60 % de mon travail, je fais aussi du travail aérien. Cela comprend entre autres le vol photo : j’embarque des photographes avec harnais, qui travaillent porte ouverte. Il faut s’adapter à ce qu’ils veulent, trouver le bon angle, la bonne vitesse… On a besoin d’une forte cohésion et d’une grosse préparation avant le vol. J’accompagne par exemple des photographes sur les éboulis de la route du littoral, les éruptions, etc.
J’effectue aussi du transport de charges, par exemple pour ravitailler le cirque de Mafate ou des chantiers inaccessibles. J’accompagne la DEAL ou des entreprises de travaux publics pour des reconnaissances, par exemple sur des éboulis sur la route de Cilaos, pour évaluer les travaux ou les purges à faire, déterminer s’il est nécessaire de fermer la route, etc. Certaines missions se font obligatoirement par hélicoptère car la visibilité avec un drone ne serait pas suffisante.
Il y a aussi la surveillance des lignes électrique avec EDF, la dépose d’agents du Parc National dans le Bras de la Plaine afin qu’ils comptent et surveillent les pétrels noirs de Bourbon (espèce d’oiseau endémique, NDLR), la lutte incendie avec un hélico bombardier d’eau, les vols de nuit, etc.
Faut-il être un bon pilote à la Réunion ?
Il ne faut pas être un bon pilote, il faut être un vieux pilote ! Pour les travaux aériens, il faut être hyper concentré, car c’est beaucoup plus dangereux qu’un vol touristique.
Il faut aussi être attentif à tout ce qui vole autour de nous : les pailles en queue qui peuvent venir sur l’hélico, les drones amateurs, de plus en plus nombreux, les parapentistes dans les nuages, certains ULM qui volent sans radio…
Décrivez-nous une journée type.
Je me lève à 4h, j’arrive à Corail Hélicoptères vers 4h30- 4h45. Là il faut compter une heure de préparation des machines : vérification mécanique des éléments, vérification des niveaux, de la batterie, nettoyage des verrières… Puis on sort les machines, on fait un point météo, on établit les plans de vol selon les circuits réservés, souvent en s’aidant des webcams de l’île pour voir la météo…
5h45, c’est l’heure du briefing : pendant environ 10 minutes, un pilote briefe les autres sur ces derniers points.
Et à 6h, c’est le décollage ! Il faut être ponctuel. On peut être amené à faire cinq à huit vols dans la matinée, qui durent entre 15 minutes et une heure.
En parallèle, je fais du travail aérien. D’ailleurs il y a chaque jour un pilote d’astreinte pour des interventions d’urgence, week-end inclus. Et en période cyclonique, tout le monde est sur le pied de guerre.
L’après-midi, il n’y a pas de vols touristiques. Je fais donc du travail aérien, du travail administratif, ou du travail au sol : formation des équipages, préparation des plannings, préparation des cours, renouvellement des licences des pilotes, suivi des pilotes… Je termine ma journée à 18 heures.
Un dernier mot ?
Pour moi, l’aéronautique c’est une passion. Vivre et voler à La Réunion est une chance exceptionnelle !
Interview Cécile Jeancolas
Photos Pierre Marchal
Superbe article et les magnifiques photos de Pierre Marchal ! Mickael toujours au top tu nous fais rêver c’est un remake de Top Gun 😉 quel beau parcours ! Bravo à l’équipe de Paradise Island Magazine !