Né à Angoulême, Philippe Saunier s’installe à la Réunion en 2003. Il crée en mars 2008, au port de Saint-Gilles Les Bains, son centre de plongée : Le Cinquième Élément.

 

Philippe obtient son diplôme national d’oenologie (DNO), puis effectue son service miliaire en Afrique, à Djibouti, durant quinze mois. Il s’installe pendant plus d’un an en Éthiopie avant de rentrer en France et se lancer dans la viticulture. Il occupe les postes d’œnologue et de régisseur, en Entre-deux-mers et travaille pour Patrick Boudon, un des précurseurs de la viticulture bio en Aquitaine. Grand fan de spéléologie, c’est par amour pour cette pratique que Philippe, quelque peu aquaphobe, se jette à l’eau, à la découverte d’un nouveau réseau situé dans une rivière souterraine. À l’époque, titulaire d’un niveau 1 de plongée, mais ne sachant pas nager, il s’empresse de se préparer en vue de cette exploration. Il se met dès lors à la natation, tout en passant simultanément son niveau 2 de plongée. « Je me suis dit, plus je serais dans l’eau, plus je serais à l’aise, alors je prenais des bains tous les jours, au lieu de prendre des douches et je faisais mes premières apnées. J’étais comme le vieux du film le Grand Bleu, dans sa baignoire avec la radio à fond », raconte Philippe. Finalement enivré par cet univers, ce qu’il considérait au départ comme un challenge, se transforme en passion.

Philippe se forme dans le bassin d’Arcachon, en Gironde et pratique beaucoup de plongée souterraine. Différente de la plongée en mer, cette pratique, très intensive, demande beaucoup de sang froid. « Lorsque l’on fait de la plongée en mer, en cas de problème, on peut remonter à la surface, tandis lorsque l’on fait de la plongée-spéléo, si tu t’énerves ou que tu t’excites, tu y restes. J’ai pratiqué un peu des deux en parallèle, ce qui m’a permis de gérer mes peurs, car cela demandait beaucoup de concentration sur ce que je faisais », explique-t-il. Audacieux, Philippe accumule les loisirs à sensation forte. Adepte du sport depuis toujours et notamment de randonnées, il en pratique plusieurs au cours de sa vie, dont le premier fut le rugby et détient un brevet A en chute libre ainsi qu’un brevet de pilote en parapente. Ayant également une formation en volcanologie et pratiquant de ce fait tous les éléments, celui-ci cherche un nom original pour sa société, représentant ses multiples facettes et opte pour Le Cinquième Élément. Lorsqu’il fonde son entreprise, Philippe est guide de montagne. Il cumule ses deux activités pendant quatre ans avant de délaisser sa fonction de guide au profit de la plongée. À ses débuts, n’ayant pas beaucoup de moyens, il achète des places dans des clubs de plongée pour emmener ses clients et se crée ainsi une clientèle régulière, lui permettant d’acheter ses équipements et un bateau, qu’il nomme Leeloo, en référence au film « Le cinquième élément ». Très cher à l’entretien, Philippe s’exprime avec humour au sujet de l’acquisition de son embarquement : « Concernant les bateaux, il y a un dicton dans notre milieu qui dit : il y a deux jours où tu es heureux ; le jour où tu l’achètes et le jour où tu le vends ! ».

Parmi ses nombreuses passions, Philippe choisit la plongée, pour son aspect pédagogique et en fait son métier. Ce qu’il aime particulièrement, c’est comprendre ses plongeurs, de ressentir leur stress et leur personnalité, afin de leur faire partager son univers dans les meilleures conditions. Le Cinquième Élément est, par ailleurs, un des rares clubs à former les personnes ne sachant pas nager au niveau 1 de plongée. «Je n’aurais sûrement pas appris à nager s’il n’y avait pas eu la plongée. C’est ce qui m’a fait aimer l’eau. Je sais que cela va être plus dur, mais je comprends leurs craintes et c’est comme cela que tu arrives à faire que ces personnes se plaisent dans un élément, en ayant très peur en surface, mais pas en dessous. Il faut être patient et s’intéresser aux gens. J’adore les baptêmes, car il faut creuser pour savoir où amener les gens et tu aboutis comme cela à faire un plongeur, sans lui faire peur », déclare-t-il. Cette profession, très prenante, lui demande beaucoup d’efforts et de temps. « Je travaille tous les week-ends. Cela n’est pas facile à combiner à ma vie personnelle, ça demande beaucoup d’investissement. Il faut être très pointilleux. C’est un métier très fatiguant, mais c’est un très beau métier », confie Philippe. C’est aujourd’hui sur Leeloo 2, une vedette de plongeur, construction de la marine nationale, de couleur orange en référence à la chevelure du personnage du film homonyme à sa boîte, qu’il emmène ses clients en mer. « Placée juste à côté de moi, il y a la société Le Grand Bleu. Si un jour Luc Besson vient nous voir, il sera super content ! », plaisante-t-il.


« Plus je pratique mes passions et plus je suis zen »

Sa plus belle expérience est pour le passionné, sa première nage avec une baleine. Lors d’une balade en bateau en 2004, en sortant du boulot, Philippe croise une baleine, complètement immobile avec son petit. « Je me suis mis à l’eau. Quand j’ai vu son œil, que j’étais sûr qu’elle me regardait, j’ai eu l’impression que ça me traversait. Il y a eu comme une connexion, une communication avec l’animal. J’ai fait pas mal de choses en peu folles dans ma vie, mais ça, le regard de cette baleine, ça m’a transpercé ». Ses lieux favoris pour pratiquer sa vocation sont, à la Réunion : le Grand Canyon, la passe de l’Ermitage et la Tour de Boucan, ainsi que, pour la plongée sur épave, l’Antonio Lorenzo, près de Saint-Leu et l’Haï Siang, situé en face de Boucan. « C’est une Île magnifique, où je peux vivre mes passions plus de trois cents jours dans l’année », déclare-t-il. Il rêve de plonger un jour en Polynésie, au Costa Rica et au Sardine Run, un événement se déroulant au large de l’Afrique du Sud, où l’on peut observer un rassemblement de sardines, attirant otaries, requins, dauphins et fous du cap et souhaite continuer sur cette lancée le plus longtemps possible, à plonger, voler et reprendre la randonnée en montagne. Il incite l’ensemble de la population à lutter contre la pollution de l’Île. « Avec mes clients, en randonnées, je faisais la règle du plus un, qui consiste à ramasser toutes nos ordures, plus un déchet qui n’est pas à nous. On peut le faire tous les jours et je l’applique moi-même depuis plusieurs années », indique Philippe.

Texte Célia Mussard
Photos Pierre Marchal et Eric Lancelot (sous-marine)